vendredi 29 juin 2007

Test : Neon Genesis Evangelion


Au premier abord, la série Neon Genesis Evangelion s’apparente à un anime de robot traditionnel. En 2015, après le « Second Impact », catastrophe qui a changé le visage de la Terre, un nouveau danger guette l’humanité. Des entités nommés « Anges » attaquent délibérément Tokyo III. Les seules armes efficaces sont des « robots » géants nommé Evangelion ou Eva. Ils sont pilotés par des enfants de 14 ans placés sous le contrôle d’une mystérieuse organisation, la Nerv. Bien des allusions à la mystique chrétienne et à la kabbale jalonnent les épisodes, contribuant à épaissir l’énigme qui entoure l’organisation. A ces questions s’ajoutent celles qui concernent les Evas. De quoi sont il/elle la copie ? Pourquoi l’Eva-01 peut elle échapper à tout contrôle ? Au fil des combats, l’Eva semble plus dangereuse pour l’humanité que pour les anges.



A partir de la seconde moitié de la série, l’intrigue de type SF est reléguée au second plan, faisant place à des interrogations sur la définition de l’Homme et des relations sociales. Le scénario se focalise sur Shinji, héros introverti redoutant le contact avec autrui. L’aspect psychanalytique se renforce progressivement, et la fin de série a suscité une vive polémique au Japon, au point qu’un dénouement différent (ou complémentaire) a été proposé sous forme de film.



Destiné initialement aux fans de Mecha, l’anime, mené de main de maître par Anno Hideaki, a su conquérir un vaste public pour renouveler le genre du « robot géant ». Le graphisme élancé suggérant la vélocité et l’agressivité de l’Eva, l’interface psychique avec le pilote immergé à l’intérieur de l’Eva comme le foetus dans le ventre maternel, la révélation de la véritable composition de l’engin... Tout ceci a marqué les esprits au point que de multiples séries copient l’idée du robot vivant, l’intrigue basé sur les relations humaines ou encore le tempo propre à la série, qui alterne passage très lent et scène de combats, dont la rapidité et la violence paroxystique sont soulignées par une fluidité d’animation époustouflante.



Profitant de son excellente connaissance du milieu des fans dont il est issu, Anno s’est servi d’Evangelion pour essayer de secouer par une thématique de choc les otaku cloîtrés dans leur monde virtuel. A mesure que la série progresse, l’animation sur celluloïd est abandonnée au profit d’expérimentation graphique, qui culmine dans les épisodes 25 et 26. Centré uniquement sur la psychologie de Shinji, l’épilogue mêle les images réelles à une animation volontairement maladroite de crayonnés au marqueur, de plans fixes sur des titres et autres. Anno semble vouloir rompre avec l’illusion référentielle, afin de rappeler qu’Evangelion n’est qu’un anime, une création artificielle. Il rejette volontairement le celluloïd fétichisé par les otaku. Plus encore, le traitement psychique qui conduit le héros à sortir de sa bulle protectrice est pensé comme une thérapie du spectateur, qui s’identifie au personnage fictif.



Evangelion reflète les phénomènes de désengagement social au Japon : l’otaku et l’hikikomori. Dans un premier cas, la personne se caractérise par sa propension à rester chez elle sans s’investir dans la société. Le terme d’otaku au Japon n’a pas le même sens que celui donné en France. Ce qualificatif est péjoratif au pays du soleil levant alors qu’ici il est d’avantage lié à la passion de la culture japonaise. L’hikikomori semble une intensification de ce phénomène. Ce retrait social a longtemps été un problème perçu comme mineur, et négligé aussi bien par le gouvernement que par les organisations sociales. Le terme désigne les adolescents ou jeunes adultes (ne souffrant d’aucune anomalie ou problème psychique) qui se cloîtrent chez eux en refusant de prendre part à la vie social pendant 6 mois et plus. Perçu tout d’abord comme un problème familiale et non comme une question de santé publique, l’hikikomori s’est développé sans que le désarroi des personnes atteintes ou des proches ait pu être soulagé.



Shinji symbolise cette jeunesse désoeuvré et craintive. Certes, son cas n’est pas aussi pathologique que les cas réels, mais son incapacité à lier des rapports amicaux basés sur une confiance mutuelle est emblématique de ces personnes que, ne pouvant supporter la pression sociale, n’on pas d’autre choix que de se replier sur eux-mêmes. C’est cette vision réaliste qui donne toute sa force à Evangelion. De plus, les références religieuses son un point clef du scénario et renforce incroyablement l’intérêt du spectateur. 2007 verra la naissance de 4 nouveaux films basés sur Evangelion et un film live semble toujours en discussion.

Aucun commentaire: