Ses mangas rencontrant un certain succès, Nakazawa entame « Gen d’Hiroshima » en 1973 pour Shonen Jump, titre phare de la Shueisha, qui tire alors à deux millions d’exemplaires. Il aborde cette fois son vécu de front, avec l’ambition de relater dans le détail la vie de ses proches sur le long terme, tout en se réservant, tout en se réservant une liberté dans le traitement des faits. Nakazawa se crée avec Nakaoka Gen un jumeau positif, courageux et débrouillard, qui lui offre le recul nécessaire pour traiter sa propre histoire. Le propos exceptionnel conditionne tout : l’histoire, construite rigoureusement suivant un processus dramatique, s’éloignant ainsi de la forme du témoignage pour tendre vers celle du récit de fiction ; le dessin, d’aspect empesé et caricatural, mais efficace ; la narration discrète privilégiant la lisibilité.
Inscrivant son propos dans l’Histoire, Nakazawa fait coexister petites et grandes histoires, la vie quotidienne de la population et les décisions des gouvernements, les enfants se rendant à l’école et le bombardier Enola Gay dans le ciel du 6 mai 1945... Les pages consacrées à ce jour infernal sont peu nombreuses, même si elles sont les plus marquantes du manga. Nakazawa voulant tout raconter de la bombe d’Hiroshima, il poursuit son récit jusqu’à son départ pour Tokyo dans les années 50, relatant la vie des irradiés, surtout ces enfants dont il partage l’histoire.
Lors de sa parution, Gen d’Hiroshima provoque des réactions violentes : pour beaucoup, le sujet reste tabou, et il est reproché à Nakazawa d’utiliser le manga pour livrer son témoignage. La publication, interrompue à quatre reprises, reprend grâce à la mobilisation des jeunes lecteurs. Au fil des ans, l’œuvre atteint une ampleur considérable : s’étalant sur dix tomes, elle devient un Best-seller traduit dans de nombreux pays, et est adapté en film, en film d’animation, en série animé et en comédie musicale. En 1983, le premier tome est publié chez les Humanoïdes Associés, puis en 1990 chez Albin Michel, mais tronqué ou estampillé d’un titre trompeur (Mourir pour le Japon). Vertige Graphic démarre plus tard une nouvelle publication, prévu pour la première fois en intégralité.
Nakazawa est aussi l’auteur de manga d’humour et de chroniques familial regroupées sous le titre « Histoires de paix ». Intervenant dans des conférences ou des reportages télévisés sur les armes nucléaires, il poursuit son œuvre d’information et de dénonciation. Il a aussi raconté son histoire dans le livre « J’avais six ans à Hiroshima », à l’initiative de l’Institut Hiroshima Nagazaki. Grâce à Gen d’Hiroshima, Nagazaki Keiji était dans les années 70 le mangaka le plus connu au monde... jusqu’à la bombe Akira de Otomo Katsuhiro.
Ouvrages disponibles en France :
Mourir pour le Japon (Gen d’Hiroshima)
Gen d'Hiroshima, tome 1 - Un survivant raconte
Gen d'Hiroshima, tome 2 - Un survivant raconte
Gen d'Hiroshima, tome 3 - Un survivant raconte
Gen d'Hiroshima, tome 4 - Un survivant raconte
Gen d'Hiroshima, tome 5 - Un survivant raconte
Gen d'Hiroshima, tome 6 - Un survivant raconte
J'avais six ans à Hiroshima, le 6 août 1945, 8h15