vendredi 17 août 2007

Profil : Nakazawa Keiji

Le nom Nakazawa Keiji est à jamais associé à « Gen d’Hiroshima » (Hadashi no Gen), œuvre unique dans l’histoire de la BD japonaise, et qui n’a d’équivalent au niveau mondial que Maus d’Art Spiegelman. Nakazawa y raconte l’irracontable : son expérience de l’enfer de la bombe atomique d’Hiroshima. Cette œuvre à laquelle il a consacré des années et des milliers de pages, est l’aboutissement de toute une vie. Né en 1939 à Hiroshima, Nakazawa Keiji grandit aux cotés de ses parents, ses trois frères et sa sœur. Le 6 août 1945, à 8h15, la première bombe atomique de l’Histoire est lâchée sur Hiroshima. Le père, la sœur et le petit frère de Keiji meurent. Quelques heures après, sa mère, enceinte, donne naissance à une petite fille au milieu des cadavres et des incendies. Nakazawa survit dans les conditions extrêmes de l’après-guerre. A quinze ans, il travaille comme apprenti peintre dans la publicité, puis gagne le premier prix d’un concours de manga à dix-huit ans. Assistant d’un mangaka, Nakazawa ressent le besoin de raconter son expérience. Son premier récit sur la bombe, « Sous la pluie noir » (Kuroi ame ni utarete), parait, après de nombreux refus d’éditeurs, en 1968. Suivent en 1970 « Soudain un jour » (Aru hi Totsuzen), consacré aux enfants irradiés, puis en 1971 son premier récit autobiographique, « je l’ai vu » (Ore wa mita).



Ses mangas rencontrant un certain succès, Nakazawa entame « Gen d’Hiroshima » en 1973 pour Shonen Jump, titre phare de la Shueisha, qui tire alors à deux millions d’exemplaires. Il aborde cette fois son vécu de front, avec l’ambition de relater dans le détail la vie de ses proches sur le long terme, tout en se réservant, tout en se réservant une liberté dans le traitement des faits. Nakazawa se crée avec Nakaoka Gen un jumeau positif, courageux et débrouillard, qui lui offre le recul nécessaire pour traiter sa propre histoire. Le propos exceptionnel conditionne tout : l’histoire, construite rigoureusement suivant un processus dramatique, s’éloignant ainsi de la forme du témoignage pour tendre vers celle du récit de fiction ; le dessin, d’aspect empesé et caricatural, mais efficace ; la narration discrète privilégiant la lisibilité.

Inscrivant son propos dans l’Histoire, Nakazawa fait coexister petites et grandes histoires, la vie quotidienne de la population et les décisions des gouvernements, les enfants se rendant à l’école et le bombardier Enola Gay dans le ciel du 6 mai 1945... Les pages consacrées à ce jour infernal sont peu nombreuses, même si elles sont les plus marquantes du manga. Nakazawa voulant tout raconter de la bombe d’Hiroshima, il poursuit son récit jusqu’à son départ pour Tokyo dans les années 50, relatant la vie des irradiés, surtout ces enfants dont il partage l’histoire.



Lors de sa parution, Gen d’Hiroshima provoque des réactions violentes : pour beaucoup, le sujet reste tabou, et il est reproché à Nakazawa d’utiliser le manga pour livrer son témoignage. La publication, interrompue à quatre reprises, reprend grâce à la mobilisation des jeunes lecteurs. Au fil des ans, l’œuvre atteint une ampleur considérable : s’étalant sur dix tomes, elle devient un Best-seller traduit dans de nombreux pays, et est adapté en film, en film d’animation, en série animé et en comédie musicale. En 1983, le premier tome est publié chez les Humanoïdes Associés, puis en 1990 chez Albin Michel, mais tronqué ou estampillé d’un titre trompeur (Mourir pour le Japon). Vertige Graphic démarre plus tard une nouvelle publication, prévu pour la première fois en intégralité.

Nakazawa est aussi l’auteur de manga d’humour et de chroniques familial regroupées sous le titre « Histoires de paix ». Intervenant dans des conférences ou des reportages télévisés sur les armes nucléaires, il poursuit son œuvre d’information et de dénonciation. Il a aussi raconté son histoire dans le livre « J’avais six ans à Hiroshima », à l’initiative de l’Institut Hiroshima Nagazaki. Grâce à Gen d’Hiroshima, Nagazaki Keiji était dans les années 70 le mangaka le plus connu au monde... jusqu’à la bombe Akira de Otomo Katsuhiro.





Ouvrages disponibles en France :

Mourir pour le Japon (Gen d’Hiroshima)
Gen d'Hiroshima, tome 1 - Un survivant raconte
Gen d'Hiroshima, tome 2 - Un survivant raconte
Gen d'Hiroshima, tome 3 - Un survivant raconte
Gen d'Hiroshima, tome 4 - Un survivant raconte
Gen d'Hiroshima, tome 5 - Un survivant raconte
Gen d'Hiroshima, tome 6 - Un survivant raconte
J'avais six ans à Hiroshima, le 6 août 1945, 8h15

dimanche 12 août 2007

Test : Actraiser

Actraiser (ActRaiser en américain) vous met dans la peau d’un dieu. Le monde dans lequel vous êtes plongé est sous l’influence omniprésente des divinités, qui sont vénérées par les peuples et pour lesquelles les hommes érigent des statues ou monuments. Malheureusement, les forces du mal sont toujours présentes et s’éveillent, mettant à mal la population. Vos fidèles se tournent alors vers vous et implorent votre aide. Votre mission est d’aider cette pauvre populace à reconquérir son territoire. Pour cela, vous avez un à votre service un ange qui, à la maniere d’Hermès, sera votre messager et vous servira d’intermédiaire avec le monde du dessous. Lorsque les coups de lame seront nécessaires, vous prendrez forme humaine en adoptant l’apparence d’une statue à casque ailé.



Actraiser se déroule en deux parties distinctes. Lorsque vous décidez de sauver un peuple du mal, il vous faut d’abord prendre les traits de votre avatar pour faire le ménage. Vous permettrez ainsi aux habitants de se sentir en sécurité et ainsi, ils seront près à se développer. Cette partie se déroule sous la forme d’un jeu d’action pur et dur mélangeant plate-forme et combat, à la manière d’un Castlevania. Vous avancez, frappez, traversez des passages de plate-forme et rencontrez des boss souvent inspirés de la mythologie grecque. La jouabilité est assez spéciale : votre personnage est plutôt speed, mais l’action vous demandera plus de patiente qu’elle ne le laisse imaginer. Le saut, et plus particulièrement les coups d’épée durant votre bond, sont décalés et sont gênant les premières fois. De plus, c’est un jeu old school, c'est-à-dire qu’il faut connaître les niveaux par cœur si vous voulez les traverser sans embûches. E avançant dans l’aventure, votre héros gagnera en niveau. Il pourra également se servir de magies, limitées par le nombre de parchemins que vous possédez. Lorsque vous aurez fini le jeu, vous aurez accès à un mode bonus qui vous permet de vous retaper tous les stages d’action du soft.
Après avoir fini le premier niveau vous revenez sur la carte où le roi et la reine vous remercient de les avoir délivrés. Ils vous demandent alors de les aider en vue de développer et d’investir le territoire ennemi. Dans cette phase de jeu, un peu à la Sim City, vous contrôlez l’ange et devez diriger les habitants dans leur conquête des terres. Vous faites construire des routes, la population se multiplie, cultive des champs, érige des maisons, alors que vous, armé de votre arc et de vos flèches, vous défendez vos fidèles contre les monstres alentour qui veulent enlever des paysans, brûler les camps ou détruire les habitations. Sur la même carte se trouvent les bases adverses vers lesquelles vous devez envoyer vos troupes, afin de les conquérir. Par la suite, chaque cité que vous aurez développée vous sera redevable et vous fera des offrandes : des vies, des flèches spéciales, des magies, ainsi que des inventions qui peuvent être transférer d’une populace à l’autre. En outre, plus la peuplade s‘agrandit, plus vous gagnez en level, ce qui influe sur la jauge de vie lors des phases d’action, ainsi que sur les sortilèges disponibles et le nombre de parchemin. Etant un dieu, vous avez tout loisir d’invoquer les éléments naturels tel que la foudre, tremblement de terre ou canicule. Comparer cette phase de je à Sim City serait comme rapprocher Luna parc de Disneyland. Nous sommes loin d’avoir autant de liberté : mise à part orienter les habitants, dégager le terrain et provoque un séisme pour réveiller un peu la populace, les commandes sont assez limitées. Pourtant, ce système est intéressant.



Actraiser est sorti alors que la Super Famicom venait à peine de voir le jour. Faisant partie des premiers jeux, il est aussi celui qui a démontré les prouesses techniques de la machine, sur les plans graphiques et surtout sonore. Proposant un univers totalement imaginaire, Enix a créé de nombreux décors variés correspondant à différent endroits du monde : foret, temple, pyramide, arbre géant, neige... Les niveaux d’action sont suffisamment diversifiés pour faire voyager le joueur. Les graphismes sont aussi très beaux pour l’époque, même si aujourd’hui les nouvelles générations peuvent regarder ce jeu avec un œil amusé. La carte du monde a permis l’une des premières utilisations du mode 7 de la Super Famicom, ce qui était très impressionnant en 1990. Mais le clou du spectacle, c’étaient, et ce sont toujours, les musiques. Yuzo Koshiro a composé des thèmes classiques impressionnants, tant sur le plan de la qualité que sur celui des arrangements. Nous connaissons tous le talent de cet artiste hors pair, qui a notamment travaillé sur Bare Knuckules 1 et 2 (Street of rage) sur Megadrive ou encore Revenge of Shinobi, titres également connus pour leur bandes-son époustouflantes. Il existe d’ailleurs des versions symphoniques des musiques d’Actraiser qui sont, comme vous l’imaginez, divinement belles.



Actraiser a traversé les années sans prendre trop de rides. Si, graphiquement le titre est dépassé, le système, lui, conserve son originalité. La mise en scène des phases d’action, avec l’orbe d’énergie qui tombe sur la statue du guerrier, les musiques entraînantes et ce thème lorsqu’on fini un niveau, représente à merveille la victoire du héros ; tous ces détails apportent un intérêt énorme au titre d’Enix.